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Confirmation du privilège donné par Henri II (octobre 1549)

[Nous] Henry, par la grâce de Dieu roi de France, à tous ceux qui verront ces présentes lettres, salut. Nos chers et bien aimés les bourgeois, manants et habitants de notre ville Françoise de Grâce se sont adressés à nous, nous rappelant qu’il leur a été donné par feu le roi, notre très honoré seigneur et père, que Dieu absolve, un privilège que nous avons depuis confirmé. Ils ont, entre autres choses, le droit de pouvoir prendre au magasin de la ville et d’acheter à bord des navires tout le sel, gros et fi
« Tôt après son sacre et couronnement, sa majesté confirma les privilèges, franchises et libertés de la ville de grâce, suivant les chartes de celle-ci, qu’il avait même amplifiés et augmentés », explique Guillaume de Marceilles, chroniqueur et premier historien du Havre, dans ses Mémoires. Les chartes confirmatives signées par Henri II en 1547 récapitulaient en effet tous les privilèges que François Ier avait accordés aux habitants de Grâce : tailles, impositions foraine, quatrième, gabelles, aides, subsides et toutes sortes de subventions leur étaient épargnés. Le franc-salé leur permettait d’acheter du sel sans être imposés. Mais en juillet 1547, le nouveau roi céda aux réclamations de Rouen : les faveurs attribuées au nouveau port faisaient perdre aux villes de Normandie le droit de taxer les marchandises vendues sur leurs marchés par les négociants du Havre de Grâce. Henri II restreignit alors considérablement les privilèges de ces derniers. Par ailleurs, à partir de l’année suivante, les habitants de Grâce furent confrontés aux exigences d’Anthoine Dubosc, fermier du grenier à sel de la ville. Celui-ci leur intenta de nombreux procès auprès des organismes des finances et obtint des droits démesurés. Gênés dans l’exercice de leur franc-salé, les habitants de Grâce se plaignirent au roi. Le souverain leur confirma ce privilège, mais les conditions strictes qu’il imposa, dans ses lettres-patentes d’octobre 1549, leur laissèrent un pouvoir d’action très limité.
ANNOTATION. Charte d’henri II consacrant le privilege du franc saller. Compiègne, octobre 1549 l.1 Henry par la grace de dieu roi de france a tous ceulx qui ces p[rese]ntes l[ect]res verront, salut. Comme noz chers et bien amez les bourgeois manans et habitans de n[ost]re l.2 ville françoise de grace nous eussent faict p[rese]nter leur humble supplication et requeste contenant que par privilleige special a eulx et leurs successeurs donne et octroie par feu de bonne memoire le roy n[ost]re tres honnore seigneur et l.3 pere que dieu absolve et par nous confirme. Ils ont entre autres choses droict de povoir prendre au magazin de lad[icte] ville et achapter a bort des navires aportant sel en icelle tout le sel gros et delye qui leur sera necessaire tant pour l.4 saller leurs harens, macquereaulx, morues, que autres leurs provisions estormens et marchandises quelzconques et iceluy sel mectre en leurs maisons et celiers y appellant les receveur et contrerolleur dud[ict] magazin en payant pour ce par eulx l.5 le droit du marchant seulement et sans nous en f[air]e ne paier aucun droict de gabelle ayde ne subside mise ou a mectre sur led[ict] sel. Pour les causes et aux charges et conditions a plain decl[ar]ees es lectres de chartres et confirmation sur ce a eulx l.6 expediees, duquel droict vulgairement appelle franc saller eulx et leurs predec esseurs ont tousiours depuis paisiblement joy, fors puis quelque temps que ung nomme anthoine du bosc marchant, qui a pris a ferme pour dix ans le fournissement l.7 et droict de gabelle d’iceluy magazin se seroit efforce et efforce ch[ac]un jour troubler et empescher les supplians en la joyssance de leursd[ictz] privilleiges et droict de franc saller combien quil ait pris lad[icte] ferme et fournissement à la charge l.8 de laisser jouyr lesd[ictz] supplians de leursd[ictz] privilleiges et que iceulx supplians naient aucunement contrevenu a iceluy ne a noz ordonnances, neantmoins il leur a sur ce faict et intente plusieurs proces tant par devant les receveur et l.9 contrerolleur dud[ict] magazin que en n[ost]re court des aydes a rouen par arrest de laquelle finablement donne parties ouyes a este dict que lesd[ictz] supplians joyront de leursd[ictz] privilleiges de franc saller suivant leursd[ictes] chartres, a la charge l.10 touteffois que led[ict] du bosc aura une clef desd[ictes] maisons et celiers ou iceulx supplians mettront leurd[ict] sel lequel du bosc non content de ce auroit trouve moien sous son faulx donne a entendre et taisant led[ict] arrest, obtenir quelques l.11 l[ect]res en n[ost]re chancellerie, En vertu desquelles il auroit faict f[air]e deffences ausd[ictz] supplians de prendre aucun sel ailleurs que en sond[ict] magazin jusques a ce que par nous en eust este autrement ordonne et commandement de l.12 apportir par devers nous leursd[ictes] chartres et privilleiges. ce que iceulx supplians obeissant aud.commandement auroient voluntairement faict pour sur ce entendre nre [nostre] bon vouloir et intention. Scavoir faisons apres que lesd[ictz] l.13 privilleiges ainsi que dict est octroyez ausd[ictz] supplians par nred[ict] feu seigneur et pere Ensemble le vidimus des privilleiges donnez et confirmez aux habitans de n[ost]re] ville de dieppe certaine sentence de provision esmanee des officiers l.14 dud[ict] magasin de nred[icte] ville de grace le vingt deuxiesme jour doctobre mil cinq cens quarante huict et certain arrest confirmatif dicelle donne en nred. [nostredicte] court des aydes aud[ict] rouen le dixneufiesme jour de février ensuivant le (jour, mois ?) l.15 au proufict desd[ictz] supplians a lencontre dud[ict] du bosc fermier dud[ict] fournissement diceluy magazin, sur la joyssance desd[ictz] privilleiges, ont este veuz et leuz en n[ost]re prive conseil, et pareillement les articles sur lesquelz ont l.16 este criez et adiugez les fournissements des greniers a sel des charges et generalitez doultre seyne yonne picardye et normandye avec ladvis du general de la charge Et ouy sur a iceluy du Bosc fermier dessusd[ict]. Nous l.17 avons dict declaire et ordonne. disons declairons et ordonnons par ces p[rese]ntes que iceulx supplians demeurans actuellement et sans fraulde en nred[icte] ville de grace, seront tenuz francs et exempts dud[ict] droict de gabelle pour l.18 le sel qui leur est et sera requis pour la provision [quatre marques, râture ?] de leurs maisons et pour la sallaison de leurs marchandises de poyssons seulement a la charge quils ne pourront user daucun sel que premierement il nayt l.19 este mys en grenier aud[ict] lieu de grace et mesure en la p[rese]nce des officiers et dud[ict] marchant fournissant iceluy ou de son commis et duquel grenier iceulx officiers auront une clef et le dict marchant une aultre pour obvier aux l.20 abbuz qui sur ce se pourroient commectre au preiudice de nous et d’icelluy marchand et que a iceulx supplians nen pourra estre delivre que par les mains desd[ictz] officiers et en la p[rese]nce dud[ict] marchant ou de sond[ict] commis et par l.21 brevetz dont ils seront tenus f[air]e reg[ist]re sous peine de confiscation de corps et de biens et oultre a la charge que ceulx ausquelz aura este delivre led[ict] sel pour lesd[ites] marchandises de poyssons seront aussi tenuz l.22 apres leurs pesches faictes de venir declairer et mectre en evidence ausd[ictz] officiers dud[ict] magazin ou bien des autres magazins a sel des lieux esquelz ilz auront faict la descente et vente de leurs[icts] poissons les especes l.23 et quantites diceulx poissons, et den prendre diceulx officiers brevet pour leur descharge qui sera semblablement enreg[ist]re es reg[ist]res du magazin ou chambre a sel ou aura este faicte lad[icte] descharge, et pareillement l.24 audit magazin de grace et oultre ce de affirmer la quantite de sel quilz auront employe a saller lesd[ictz] poyssons et de rapporter et remectre ce qui leur en restera lad[icte] sallaison faicte, en icelluy magazin de grace et l.25 avons au surplus inhibe et deffendu inhibons et deffendons ausd[ictz] supplians et a leursd[ictz] successeurs de prandre ou achapter aucun sel pour le vendre a aucunes personnes quelques quelles soyent privilleigiees ou non l.26 privilleigiees soubz lesd[ictes] peines et oultre de perdition desd[ictz] privilleiges Si donnons en mandement par ces mesmes p[rese]ntes a nos amez et feaulx les generaulx conseillers par nous ordonnez tant sur le faict l.27 de noz finances que de la justice des nosd[ictes] aydes aud[ict] rouen. aux esleuz sur le faict dicelles a monstivillier receveur et contrerolleur dud[ict] magazin de n[ost]re ville francoise de grace Et a tous noz autres justiciers officiers l.28 ou a leurs lieuten[ants] et a chacun deulx si comme a luy appartiendra Que de noz p[rese]nes voulons declaration et ordonnance Ils facent seuffrent et laissent lesd[ictz] supplians et leurs successeurs demeurans actuellement en lad[icte] l.29 ville jouyr et user plainement et paisiblement par la maniere et ainsi que dessus est dict et decl[ar]e sans leur faire mectre ou donner ne souffrir estre faict mis ou donne ores ne pour le temps advenir aucun trouble destourbe l.30 ou empeschement ou contre lequel si faict mis ou donne leur estoit ou avoit este le repparent et remectent ou facent repparer et remectre incontinent et sans delay a plaine et entiere delivrance et au premier estat de l.31 deu et a ce f[air]e et obeyr contraignant ou facent contraindre (recemment ?) et de faict tous ceulx quil appartiendra et pour ce feront a contraindre par les peines cy dessus indictes (indiqués)et par toutes autres voies et manieres l.32 deues et raisonnables nonobstant oppositions clameurs de haro doléances et appela[ti]on quelzconques edictz ordonnances faictes et a f[air]e sur le faict ordre et distribution de noz finances et des magazins l.33 a sel de n[ost]re royaume ausquelles autant que besoing est et aux derogatoires des derogatoires y contenues Nous avons de n[ost]re puissance et auct[orit]e pour ceste foys deroge et derogeons par cesd[ictes] p[rese]ntes l.34 ausquelles en tesmoing de ce nous avons faict mectre n[ost]re scel Donne à Compiegne le XIème jour doctobre mil cinq cens quarante neuf et l.35 de n[ost]re regne le troisiesme. Par le roi en son conseil Duthier [fragment de sceau]
[Nous] Henry, par la grâce de Dieu roi de France, à tous ceux qui verront ces présentes lettres, salut. Nos chers et bien aimés les bourgeois, manants et habitants de notre ville Françoise de Grâce se sont adressés à nous, nous rappelant qu’il leur a été donné par feu le roi, notre très honoré seigneur et père, que Dieu absolve, un privilège que nous avons depuis confirmé. Ils ont, entre autres choses, le droit de pouvoir prendre au magasin de la ville et d’acheter à bord des navires tout le sel, gros et fin, qui leur sera nécessaire, pour saler leurs harengs, maquereaux, morues et leurs autres provisions, et de le stocker dans leurs maisons et celliers. Pour ce sel, ils paient aux receveurs et contrôleurs le droit du marchand uniquement, car ils ne nous doivent aucun droit de gabelle, aide ou subside sur cette denrée. Par les causes, charges et conditions déclarées dans des lettres de chartre et de confirmation qui leur ont été envoyées, les habitants de la ville et leurs successeurs ont en effet bénéficié, depuis toujours, d’un droit vulgairement appelé franc-salé, et ce jusqu’à récemment. Depuis peu, un certain Anthoine Dubosc, marchand ayant loué pour dix ans le droit de gabelle de ce magasin et son approvisionnement, s’efforce d’empêcher les habitants de jouir de ce franc-salé. Il s’était pourtant engagé à respecter cette prérogative lors de la prise de ses fonctions. Alors que les habitants n’ont, en aucune manière, outrepassé leurs droits ou nui à ce marchand, Dubosc, saisissant les receveurs et contrôleurs du magasin à sel ainsi que notre Cour des Aides à Rouen, leur a intenté plusieurs procès : les différentes parties ayant été entendues, il a été décidé par arrêt de la Cour que, si les suppliants pouvaient continuer à bénéficier du privilège de franc-salé, le sieur Dubosc aurait dorénavant en sa possession une clé de tous les maisons et celliers dans lesquels ceux-ci déposeraient leur sel. Estimant que ce n’était pas encore suffisant, le marchand, taisant les conditions imposées par l’arrêt de la Cour des Aides, a trouvé le moyen d’obtenir de notre Chancellerie quelques lettres, en vertu desquelles il a pu interdire aux habitants de la ville de prendre du sel dans un autre magasin que le sien. Nous avons alors demandé aux habitants de Grâce de nous apporter leurs chartres et privilèges, ce qu’ils ont fait. Nous faisons donc savoir que nous avons vu et validé les lettres de privilèges données aux habitants de Grâce par feu notre seigneur et père. Elles sont elles-mêmes des copies des lettres de privilèges octroyées aux habitants de notre ville de Dieppe. Nous avons au préalable consulté la sentence de provision, datée du vingt-deux octobre 1548, émise par les officiers du magasin à sel de Grâce, et l’arrêt de notre Cour des Aides de Rouen, promulgué le dix-neuf février suivant [1549], confirmatif de la sentence. Les deux documents prenaient parti des suppliants contre le Sieur Dubosc. Nous avons également eu entre les mains les documents relatifs aux mises aux enchères des fermes de l’ensemble des greniers à sel des généralités d’Outre-Seine, d’Yonne, de Picardie et de Normandie. Nous avons entendu l’avis du général de ces mises aux enchères, ainsi que celui du sieur Du Bosc. Nous avons alors dit, déclaré et ordonné, disons, déclarons et ordonnons, par ces présentes lettres, que les suppliants vivant actuellement sans fraude en notre ville de Grâce seront exemptés du droit de gabelle sur le sel nécessaire à l’approvisionnement de leurs maisons et à la salaison de leurs marchandises de poissons. Ils en seront affranchis à condition qu’ils ne se fournissent pas dans un autre grenier, que le sel soit pesé en présences des officiers du grenier de Grâce, du dit marchand ou de son commis, sous peine de prison et de confiscation des biens. Ceux qui se seront fournits en sel pour leurs marchandises de poissons seront également tenus, après leurs pêches, de venir déclarer auprès des officiers du grenier de Grâce, ou d’autres magasins des lieux, où ils auront vendu leurs poissons, la sorte et la quantité de sel prise. Ces officiers leurs donneront pour cela des brevets qui seront inscrits dans le registre du magasin ou chambre à sel concerné. En plus de préciser la quantité de sel qu’ils auront employé à saler les poissons, ils devront rapporter et remettre ce qui leur en restera, salaison faite, au dit magasin de Grâce. Nous interdisons et défendons aux suppliants et à leurs successeurs de prendre et acheter du sel pour le vendre, à des personnes privilégiées ou non, sous peine de perdre leurs propres privilèges. Nous demandons à nos aimés et dévoués généraux et conseillers chargé des finances et des impôts à Rouen et à Montivilliers, aux receveur et contrôleur du magasin de notre ville Françoise de Grâce, et à tous nos autres justiciers, officiers ou leurs lieutenants, qu’ils fassent et laissent les habitants de la ville et leurs successeurs jouir du contenu de ces lettres, pleinement et paisiblement, sans aucun empêchement. Nous voulons qu’ils contraignent tous les concernés à respecter cette décision, par toute voies et manières raisonnables. En vertu de notre puissance et autorité royale, nous dérogeons pour cette fois à toutes oppositions, clameurs de Haro, doléances et appellations quelconques, édits et ordonnances faits et à faire à l’encontre de cette décision. En témoignage de celle-ci, nous avons fait mettre notre sceau à ces présentes lettres. Donné à Compiègne, le onzième jour d’octobre 1549, la troisième année de notre règne. Par le roi en son conseil, Duthier